Samedi 12 et dimanche 13 janvier 2013, le siège du Parti communiste français – situé Place du Colonel Fabien à Paris – ouvre ses portes pour rendre hommage à son architecte, le brésilien Oscar Niemeyer décédé le 5 décembre dernier à l’âge de 104 ans.
Visites, conférences, projection de film et concert, ces journées portes ouvertes sont une occasion unique de découvrir les entrailles du bâtiment et cet architecte au parcours hors du commun.
Oscar Niemeyer (1907-2012)
Oscar Niemeyer au Havre, le 17/02/1977 (AFP)
« Ce n’est pas l’angle droit qui m’attire, ni la ligne droite, dure, inflexible, créée par l’homme. Ce qui m’attire, c’est la courbe libre et sensuelle, la courbe que je rencontre dans les montagnes de mon pays, dans le cours sinueux de ses fleuves, dans la vague de la mer, dans le corps de la femme préférée. »
Oscar Niemeyer
Communiste, humaniste, précurseur et éternel amoureux des courbes -et en premier lieu, de celles des femmes- Oscar Niemeyer laisse derrière lui plus de 600 œuvres, dont le siège de l’ONU à New York ou encore, travail colossal, la ville de Brasilia au Brésil. Ses créations de béton et de verre, de vides et de pleins, de formes gracieuses et de courbes subtiles, occupent aujourd’hui une place majeure dans l’histoire de l’architecture moderne.
Avant même d’être diplômé de l’École des Beaux-Arts de Rio de Janeiro en 1934, il intègre l’équipe d’architectes brésiliens de Lucio Costa, en se proposant en tant que bénévole. Entre 1940 et 1954, son travail se concentre sur trois villes : Rio de Janeiro, Sao Paulo et Belo Horizonte.
En 1964, alors que sa carrière est déjà bien lancée, Oscar Niemeyer est contraint de fuir la dictature militaire brésilienne. Celui qui se décrivait comme un être révolté, s’exile alors en France où il laissera plusieurs réalisations avant son retour au Brésil en 1985 : l’ancien siège du journal L’Humanité à Saint-Denis, la Bourse du Travail à Bobigny, la Maison de la Culture au Havre (aujourd’hui renommée le Volcan) et le fameux siège du Parti communiste français.
Le siège du parti communiste français
“Nous lui sommes éternellement reconnaissant (…). Il a fait un lieu de lutte pour la solidarité, contre l’injustice, contre la discrimination et pour la libération humaine. Toute son existence, il est resté fidèle à ses idéaux, et c’est quelque chose qui est resté très important pour lui.” confiait Gérard Fournier à l’AFP, administrateur du siège du PCF, le 6 décembre 2012, lendemain du décès d’Oscar Niemeyer.
Sculpture d’Oscar Niemeyer, devant le bâtiment
La petite histoire veut qu’Oscar Niemeyer ait griffonné en 3 jours seulement et gracieusement ce qui deviendra le bâtiment du siège du Parti. Les travaux commencent en 1968 et sont réalisés avec l’ingénieur Jean Prouvé, Jean de Roche et Paul Chemetov. Fini en 1971, l’immense bâtiment de 6 étages de murs-rideaux signés Jean Prouvé et dont le mouvement rappelle celui d’un drapeau déplié, semble ne pas toucher le sol.
Sur le parvis, une coupole blanche surgit du sol. Niemeyer y voyait une métaphore de la fécondité. Ce dôme abrite sous terre un auditorium à l’acoustique réputée pour être exceptionnelle, et où se réunissait le Comité central du PCF. La construction de la coupole, de l’aménagement du parvis et du hall souterrain ne s’achèvera qu’en 1979-80, ralentie par des préoccupations financières.
La visite
Habituellement fermé le week-end, le siège du parti rend aujourd’hui hommage à son architecte et nous laisse parcourir ce bâtiment en toute liberté pendant deux jours.
Là-bas, le temps semble s’être arrêté : moquette très présente -même sur les murs – mobilier d’époque conçu par Niemeyer et couleurs étouffées. Ce qui frappe également, ce sont les formes courbes si chères à Niemeyer, qui invitent le corps et le regard à glisser. Côté matériaux, le verre qui reflète et laisse passer la lumière côtoie l’acier, la céramique, le bois, sans oublier ce béton “brut de décoffrage” omniprésent, qui garde encore les stigmates des planches qui l’ont formé il y a 45 ans.
Béton “brut de décoffrage”
Salle des délégations
Salle des délégations , notez l’angle courbe du mur (et cette petite moquette verte…)
Mobilier dessiné par Oscar Nimeyer dans le hall souterrain
Couloirs
Salles de réunion, cafétéria, toit terrasse à la vue imprenable, chaque lieu a son atmosphère, son Histoire et en particulier la fameuse coupole, qui prend racine en sous-sol et s’élève, incroyablement lumineuse et futuriste, grâce aux innombrables lamelles d’aluminium qui la recouvre.
L’entrée de la coupole à l’allure proche d’un film de science-fiction
Le plafond de l’auditorium est recouvert d’innombrables lamelles d’aluminium
Depuis 2007, le bâtiment a été classé au titre des monuments historiques, ce qui lui permet de bénéficier d’aides de l’état pour l’entretien. Une partie des locaux ont été louées à différentes sociétés (bureau d’architectes, société de production, etc.) et le siège, aujourd’hui rebaptisé Espace Niemeyer, est régulièrement utilisé pour accueillir des défilés (Prada, Thom Browne, etc.), des expositions ou encore des tournages de clips ou de films, comme c’est le cas pour le prochain film de Michel Gondry, L’écume des jours.
Cette visite est également l’occasion de visionner le documentaire réalisé par Rogier van Eck et Marc-Henri Wajnbergde “Oscar Niemeyer, Un architecte engagé dans le siècle“, dans lequel il est bon de découvrir cet homme, plein de vie, volubile, traçant au feutre des lignes fluides de ses différents projets, parlant de ses convictions avec passion et de la beauté des nuages.
Après votre visite, n’oubliez pas de passer par la “librairie” pour vous procurer les cartes postales d’époque !
Vue d’ensemble ©Michel Moch
Salle de réunion du Comité Central ©Michel Moch
Portes ouvertes samedi 12 et dimanche 13 janvier, de 10h à 17h30 – visites libres (les réservation étaient indispensable pour la conférence et le concert, mais c’est hélas COMPLET.)
Plus d’infos et programmation ici
Espace Niemeyer – siège du PCF- 2 place du Colonel Fabien 75019 Paris
Métro Colonel Fabien (ligne 2) – Tél. : 01 40 40 12 12